Voici,
comme premier article,
un rapide petit commentaire sur le cross-média comme moteur de la narration d'AlanWake.
-Le jeu
vidéo (évidemment !) :
La narration d'Alan Wake
utilise toutes les composantes du jeu vidéo : les phases de
gameplay actives, les « contemplatives » (aller chercher
les clés du chalet, parler à Rusty, à Rose,...) et les scènes
cinématiques. Seulement, tout cela est plus compliqué qu'il n'y
paraît dans la mesure où toutes ces composantes reposent grandement sur des ficelles
cinématographiques (autant dans leur traitement que dans leur
écriture). Ce rapprochement est bien plus prégnant que dans d'autres
jeux (grâce à des références directes, indirectes, des pastiches
et autres emprunts...). Si l'on creuse encore plus, la construction
narrative du jeu renvoie directement aux séries télévisées (avec
la construction en épisodes, le previously on, les
cliffhangers,...) et à la littérature (la prégnance de la voix-off
et donc l'utilisation d'un narrateur à la première personne ;
sans parler du fait que le jeu est parsemé de références
littéraires et que le personnage principal est écrivain). Ainsi, en
un seul média - le jeu vidéo - nous en trouvons en fait quatre :
lui-même, le cinéma, les séries télévisées et la littérature.
-La
littérature :
En plus de
sa prégnance dans le récit et des emprunts que nous évoquions, la
littérature parcourt le jeu et son univers de façon directe. Cela
passe ainsi par les pages du manuscrit qui parsèment l'aventure et
que le joueur peut chercher. Il y a également le livre Les
dossiers d'Alan Wake fourni dans l'édition collector. Dans ces
deux cas, l'utilisation de la littérature est un moyen habile de développer l'histoire et l'univers du jeu sans
nuire à l'interactivité ni rendre le joueur passif (le livre
peut être consulté ailleurs qu'en jouant tandis que les pages du
manuscrit - grâce à la voix-off renvoyant aux journaux audio deBioshock - permettent d'être entendus sans mettre
l'aventure en pause).
-Le
cinéma et la vidéo :
En plus des
scènes cinématiques et de certaines phases de gameplay, ce jeu
utilise directement le cinéma (ou, du moins, la vidéo). Ainsi, le
jeu est jalonné de séquences « lives » filmées avec de
vraies acteurs. Cela peut être à des fins d'ambiance (l'œil dans
la télévision, les délires d'Alan Wakes dans les DLCs,...) ou dans
le but de compléter l'histoire et l'univers (l'émission de
télévision portant sur le dernier livre de Wake et dans laquelle
Sam Lake fait un cameo). Nous retrouvons d'ailleurs cela avec la
mini-série Bright Falls qui sert de prologue au jeu
et qui - comme toujours - approfondi à la fois l'univers tout en
ajoutant de nouvelles pierres à l'histoire. Le tout, à l'instar deLes dossiers Alan Wake, sans alourdir la narration ni
l'expérience du joueur puisque cette série est proposée -
gratuitement - en complément du jeu.
-L'audio :
Je
n'évoquerai pas ici la bande-son en soi (bien sûr que les dialogues
jouent un rôle dans l'histoire, ce n'est pas pour autant du cross-média :
les jeux vidéo étant un médium audiovisuel) mais certains éléments comme
les radios (la station locale ou celles de la police), la chanson
composée pour le jeu The Poet and The Muse des Old Gods of Asgard (qui possède d'ailleurs un clip réalisé avec
les acteurs des vidéos) et les titres « empruntés »
(Space Oddity, la chanson de Depeche Mode,
etc...).
Pour
conclure ce court article, nous pouvons voir que les
différents médias utilisés (jeu vidéo, littérature, séries
télévisées, cinéma, audio,...) par Alan Wake ont de façon
récurrente une fonction duelle. Ainsi, cette utilisation du cross-média a tout d'abord une
fonction diégétique, c'est-à-dire qu'il permet de façon
directe de comprendre l'histoire ou l'univers du jeu et de les
étoffer. Le cross-média dans Alan Wake a ensuite une fonction narrative, c'est-à-dire que
c'est par son biais qu'est racontée l'histoire, que l'ambiance du
récit est posée,...